Défusion....
A la demande de quelques unes, voici une petite info sur ce qu’on appelle la ‘défusion’, un processus thérapeutique issu de la thérapie ACT, laquelle est proche de la pleine conscience (puisque d’ailleurs elle l’utilise également).
Cela est très utile pour les personnes (comme moi) dont les EME sont principalement liées au fait qu’elles se déconnectent d’elles-mêmes pour être totalement absorbées par leur pensée, qu’elle soit verbale ou non (non-verbale pour moi).
Avec la défusion, il s’agit d’aborder ses pensées d’une façon différente, en réduisant leur influence sur nous. Il ne s’agit donc pas de les faire « disparaître », bien que la tentation soit grande, au début, tant que l’on n’a pas intégré l’acceptation, c'est-à-dire l'abandon de la lutte intérieure contre ce qu’on ressent, lutte stérile et fatigante.
Si quelques pensées douloureuses peuvent s’évanouir, parfois, lorsque l’on pratique ces techniques, la tentation est grande de s’en servir alors systématiquement pour faire disparaitre ces pensées qui nous gênent...
mais c’est une très mauvaise idée, car d’une part cela nous incitera à persévérer dans la bataille intérieure contre nos ressentis (bonjour les EME) et par ailleurs cela ne fonctionnera pas, de tout façon, pour les pensées et les schémas douloureux récurrents, forts, de notre vie, nous ne passerons pas à travers les mailles du filet, il nous faudra les regarder en face, les assumer, les vivre, en un mot : les accepter.
La défusion ne sert qu’à ACCEPTER ses pensées, tout simplement parce qu’on ne les considère plus que comme des mots, pas comme une réalité, les mots ne sont plus « fusionnés » avec ce qu’ils représentent, ce sont « juste » des mots… ils perdent alors beaucoup de leur influence sur nous…..
En état de « fusion », les pensées semblent être la vérité absolue et d’une importance capitale, elles nous font de la peine, elles nous font peur, parfois...
En état de « défusion », nous pouvons reconnaitre qu’il s’agit juste de sons, de mots, d’histoires, qu’elles ne sont pas forcément vraies, et qu’elles ne sont pas forcément importantes, on est nullement obligé de leur obéir, et qu’elles ne constituent pas une menace, car elles ne peuvent rien « FAIRE » concrètement….
Du coup, on perd le besoin de faire « disparaitre impérativement » ces pensées désagréables à pénibles…..
Et quand on n’a plus besoin de faire disparaitre, eh bien, on n’a plus d’EME (et croyez-moi, ça fait du bien !)
Comme vous le voyez donc, et j’insiste là-dessus au risque de radoter sérieusement, il ne faut pas louper une étape, ce n’est PAS :
défusion => disparition des pensées gênantes => je me sens « un peu plus confortable » => je suis toujours en lutte et déconnecté de moi-même
Mais bien plutôt :
défusion=>acceptation des pensées gênantes => je suis « moi » => pas forcément ‘confort’, mais sentiment de connexion, de plénitude même (parfois), the war is over (if you want it, comme dirait John Lennon)
Alors bien sûr, il faut renoncer à « être bien tout le temps », car la vie est faite de hauts et de bas et cette idée que l’on pourrait toujours être zen, positif, en forme, bien dans ses baskets en permanence est un leurre auquel j’ai longtemps adhéré d’ailleurs (bien inconsciemment, je l’avoue)
on ne sera pas toujours 'confortable', mais on sera beaucoup plus heureux, et puis surtout on n'aura plus besoin d'avoir recours à la nourriture pour 'se sentir mieux', ce qui est quand même le cas de pas mal de personnes ici
vous pourrez dire aussi adieu au sentiment de vide intérieur...
Cet immense préambule étant fait, voici maintenant quelques techniques qui m’ont beaucoup aidée pour pouvoir accueillir mes ressentis-pensées….. et qui m’ont permis de passer d’une dizaine d’EME par jour à ….. trois-quatre par semaine à tout casser.
A n’utiliser qu’avec les précautions ci-dessus, donc…. Sinon le service après-vente ne répondra plus de rien ;-)
1/ Je suis en train de penser…
Se dire : je suis en train de penser que….suivi de la pensée désagréable..
Par exemple, la pensée « je n’intéresse personne » se pointe…. On se dit dans sa tête « je suis en train de penser que je n’intéresse personne », et puis « je remarque que je suis en train de penser que je n’intéresse personne »
2/ Sur un air connu
Chantez intérieurement la pensée sur un air connu (bon anniversaire, la 5ème de Beethoven ou n’importe quoi d’autre)
3/ Donner un titre à l’histoire que nous raconte notre esprit.
Ex : l’histoire du looser, l’abandonnée, la non-intéressante, l’inadapté, l’incapable, l’incompétent… Une fois que vous avez reconnu l’histoire en question, laissez-la simplement exister, sans lui accorder beaucoup d’attention, vous pouvez également imaginer une affiche de film de l’histoire en question, en en rajoutant dans le « pathos », en imaginant le rôle repris par les plus grands acteurs…. pour ma part j'aime rajouter un titre secondaire un peu excessif, ça fait genre
"LA MAL-AIMEE... rejetée par tous elle sombre dans l'anonymat le plus complet.... en ce moment sur vos écrans..."
4/ Remerciez son esprit…
genre : « merci ma tête, tu m’as encore servi l’histoire de l’incompétente notoire, tu es toujours au taquet… »
5/ Silly voices
Imaginez la pensée (ou la litanie) dite par une voix ridicule ou particulière, genre donald, scharzy, stallone, Shrek, ou the Monty Python (pour moi)
Pour ma part j’ai une grosse préférence pour « donner un titre » parce que ça fonctionne tellement bien pour moi, qui ne pense pas tant en mots qu'en "ressentis", qu'en "impression" , ça me fait sourire et cela me permet vraiment de me reconnecter à moi-même en dédramatisant ce ressenti....
et parfois, je rajoute les voix ridicules, par exemple Terry Jones des Monty Python singeant une voix de femme, enchainant plusieurs à la suite, parfois j’imagine même que ce sont des acteurs qui doublent les dessins animés qui font la voix tout en voyant les images du film…..
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Répondre
Je pense en effet que l'inquiétude n'est pas si banalisable. C'est un tel soulagement de voir que ce qui me bloquait, ça n'était pas l'inaptitude "objective", juste l'inquiétude intérieure. Mais c'est vrai qu'elle se cache derrière tous mes ressentis d'inaptitude, en fait.
et tu as raison, ça aide vraiment les gens quand ils s'aperçoivent qu'ils s'inquiètent (et que c'est humain!)
elle irrigue plein d'autres ressentis en effet, et elle est très liée au controle, du coup (pour se préserver de cette inquiétude)
Ce que j'arrive à peu près à utiliser, c'est le remerciement à mon cerveau pour me servir telle ou telle histoire. Ca n'est pas si facile, puisqu'il faut rester bienveillant, pas caustique.
Exemple : quand je décide de prendre une douche en pleine conscience, et que je m'aperçois en me séchant que j'ai été entièrement plongée dans mes pensées d'un bout à l'autre jusqu'à ce moment, je me dis "Merci mon cerveau pour avoir si bien réussi à me divertir, au cas où je m'ennuierai". Ou quand je décide de faire une mini-paella : "Merci mon cerveau de me prévenir que c'est difficile et que peut-être je n'y arriverai pas".
Pour la paella, c'était rigolo. Ca m'a vraiment plu de le faire (sauf tuer les moules). Mais quasiment à chaque étape, j'avais envie de tout laisser tomber pour que ça ne soit pas raté. A un moment, j'ai tellement fusionné avec la pensée que j'étais en train de tout rater que je suis allée voir mon mari un peu dans l'urgence (style j'ai mis le feu à la cuisine), et une fois que j'ai eu son attention, je ne savais plus quoi poser comme question. J'ai fini par en trouver une : "Euh... j'ajoute l'eau de cuisson des moules au riz ?" tout en m'apercevant que d'une part, ce n'était pas cette question qui m'avait poussée à interrompre son flemmardage, et que d'autre part, je connaissais LA réponse de la recette et la réponse qu'il allait me donner. Je me suis rendue compte que c'était juste l'histoire de la nana qui n'a pas un échantillon sur elle qui m'avait poussé à l'action. J'avais un peu envie qu'il reprenne la confection de la paella, et très envie de la continuer toute seule. Du coup, j'ai ajouté : "Je suis inquiète pour la cuisson des moules. Y en a des blanches". Il a dit, sans venir vérifier (genre il me fait confiance, le fou !) que c'était normal, et que ça sentait bon. Et voilà, c'est tout. J'étais assez contente d'avoir réussi à identifier pourquoi j'étais allée l'appeler au secours, et contente d'avoir finalement réussi à mettre un mot (à haute voix !) sur une émotion qui, somme toute, est plutôt bénine : l'inquiétude.
[quote=Pattie]
J'étais assez contente d'avoir réussi à identifier pourquoi j'étais allée l'appeler au secours, et contente d'avoir finalement réussi à mettre un mot (à haute voix !) sur une émotion qui, somme toute, est plutôt bénine : l'inquiétude.
[/quote]
bravo Pattie, d'avoir "spotté" l'inquiétude, tu verras que ça adouciras totalement tes relations
quand on exprime aux autres que notre "névrose" est uniquement due à de l'inquiétude, ils comprennent et sont très compréhensifs, ils nous pardonnent de leur prendr ela tête
et comme nous on a compris pourquoi, on leur prend moins la tête
l'inquiétude pour moi ce n'est pas bénin, c'est vraiment très important!!!!!
comme tous les anxieux je suppose
accorder moins d'importance à mes inquiétudes, mais accepter que je m'inquiète et que c'est comme ça, et que pourtantce n'est pas si important, ça a changé ma vie
je le fais ausssi pour ma fille
avec elle, on donne rdv à nos inquiétudes, ma fille lui donne même une "montre" (parce qu'en général elle vient très en avance!!!)
Merci pour ta réponse.
J'ai un peu avancé dans la lecture du bouquin et l'auteur revient à plusieurs reprises sur ce point. Il explique que ce n'est pas la technique mais l'intentionalité qui compte. On peut utiliser la défusion comme une stratégie de contrôle puisque cette technique a pour effet de rendre ces pensées moins présentes, mais cette utilisation n'est pas efficace à long terme, comme tu l'expiques bien.
[quote=Léonore]
Il explique que ce n'est pas la technique mais l'intentionalité qui compte. On peut utiliser la défusion comme une stratégie de contrôle puisque cette technique a pour effet de rendre ces pensées moins présentes, mais cette utilisation n'est pas efficace à long terme, comme tu l'expiques bien.
[/quote]
tout à fait et c'est très important
surtout pour les mangeurs émotionnels
c'est pour ça qu'en début de ce fil j'ai mis mille recommandations : attention!!!! warning!!!! ne pas utiliser en controle....
c'est vrai que des controleurs émmotionnels patentés pourraient s'en servir pour les controler, et au début, comme c'est un réflexe, on a tendance à le faire
genre : tropp bien, la pensée est partie, j'ai une arme de controle géniale!!!!!
sauf que dans ce cas là, les EME reviennent, mais alors avec une force, c'est un vrai tsunami
ça c'est un bon signe
l'EME étant l'arme de force du controle par excellence, quand elles sont là, c'est bien qu'on était dans le controle émotionnel à blind
et oui, on peut utiliser la défusion comme controle émotionnel
et c'est très dangereux
c'est en effet l'intention qui compte, pas la technique
la pensée doit devenir "moins importante" mais ne doit pas "disparaitre" ou ne plus exister
si notre intention est plus ou moins de la faire s'en aller, on se plante
si notre intention est de la rendre moins importante afin d'accepter sa présence, alors là c'est bon
Bonjour,
Après avoir traîné sur ce forum, je lis le fameux "Le piège du bonheur". Je ne comprends pas bien en quoi la défusion n'est pas une stratégie de contrôle des pensées. J'ai besoin de vos éclairages.
Exemple concret :
En lisant ce livre alors que j'ai plein d'autres choses à faire, je me dis "je suis en train de procrastiner"
Tiens, une pensée, négative ! Ca tombe bien j'en ai besoin pour mettre en pratique ce que je lis. Donc "Je suis en train de penser que je procrastine" ; "Je remarque que je suis en train de penser que je procrastine".
Ok, ça me fait sourire, la pensée est moins culpabilisante et moins présente.
En quoi n'ai-je pas contrôlé cette pensée en faisant ça ? Le résultat n'est-il pas le même que si je contourne cette pensée par un mécanisme d'évitement ? (je me doute bien que la réponse est non, mais ce n'est pas complètement évident pour moi)
Je pense qu'il y aura plus calé que moi pour te répondre mais je me jette à l'eau quand même
En fait, avec les stratégies d'évitement, tu as de très grands risques qu'à moyen terme ta pensée parasite revienne, voire devienne obsédante. Si je te demande de ne surtout pas penser à un ours blanc, là tout de suite, y arrives tu?
La défusion ne cherche pas à chasser la pensée ou à faire que l'on n'y pense plus. En fait, on comprend que l'on ne peut pas empêcher l'esprit de penser, c'est comme une radio qui diffuse en continu des émissions, qui juge, qui donne son avis, qui saute du coq à l'âne. Par contre, avec la défusion, on se rend mieux compte que toutes ces pensées ne sont que des pensées, des histoires, peut être vraies, peut être fausses, parfois utiles, la plupart du temps non.
Et quand on a passé des années englué dans ses pensées, à y croire dur comme fer, à ne jamais avoir osé imaginer que l'on pourrait les remettre en cause, et que ces mêmes pensées, à maintes reprises, nous ont dicté notre comportement, au final, eh bien, la défusion apparait comme une révolution, sinon comme un outil merveilleux et très puissant!
Oui, la pleine conscience. Mais à chaud, c'est vraiment trop difficile. Je le fais, mais du bout de l'attention, comme si je devais plonger le doigt dans l'eau bouillante (le bout du doigt, c'est déjà beaucoup !) J'essaie de le faire plutôt à froid, quand tout va bien, quand ça s'apaise. Et parfois, ça se fait de soi-même à chaud.
Par exemple la douleur des règles. Quand ça arrive, je me recroqueville. La dernière fois, j'étais dans une période très chouette, avec pas mal de pleine conscience formelle (avec audio) et beaucoup beaucoup de pleine conscience informelle. J'ai eu l'impression de m'offrir à la douleur (c'est un peu idiot, dit comme ça, mais voilà : c'était ça). L'impression que la porte était ouverte, qu'elle s'engouffrait dedans, et que je la laissais faire. C'était assez puissant, comme expérience (mais vive les anti-inflammatoires !) Je n'irai pas jusqu'à faire exprès de "laisser la porte ouverte", mais quand ça se passe comme ça, de manière impromptue, je peux laisser se passer des choses qui avant m'auraient fait me recroqueviller.
Léonore, c'est très juste, beau et bien observé ce que tu décris... on les voit bien ces petits lézards... en observant tes pensées elles s'enfuient c'est normal c'est très juste et ça disparaitra ou pas cette forme de défusion là ;-) laisse passer, laisse disparaître... observe, ne juge pas, laisse couler les pensées dans les fissures ça marche aussi, si,si, ce n'est pas du contrôle.. bonne méditation à toi car c'est exactement ce que tu fais :-) !