Manger de la viande est-il bon pour la santé ?

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Nous avons vu dans l’épisode précédent que les viandes étaient lourdes de représentations et qu’elles étaient des aliments ambigus. Venons en, maintenant, à ce que nous dit la science de la nutrition : de quoi les viandes sont-elles composées?
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Manger de la viande est-il bon pour la santé ?
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Manger de la viande pour ses protéines

Pourquoi manger de la viande ? Pour ses protéines, tout d’abord, parce que dans ces protéines, il y a des acides aminés. Nous mangeons la viande ou la charcuterie, nous la digérons et récupérons les acides aminés pour construire les propres protéines de notre corps. En fait, notre organisme est en perpétuelle reconstruction, les cellules meurent et doivent être renouvelées, et nous avons besoin d’un apport protéique d’environ 50 à 80 grammes par jour. Huit acides aminés sur une vingtaine sont dits essentiels car l’organisme ne sait pas les fabriquer à partir des autres acides aminés. Et il se trouve que les produits animaux apportent la totalité des acides aminés nécessaires, tandis que les végétaux n’ont que des protéines incomplètes. 
 
Ce qui ne rend tout de même pas la viande obligatoire. Si on ne consomme pas du tout de produits animaux, on peut faire des assemblages de végétaux pour récupérer tous les acides aminés essentiels. Par exemple, on mangera des légumineuses (lentilles, pois, haricots), qui apportent de la lysine, en même temps que des céréales (riz, pâtes, pain) qui apportent de la méthionine. Un autre moyen sera de consommer des céréales seules, ou des légumineuses seules, mais avec une petite quantité de produit animal (viande, poissons, œufs, charcuterie, laitages, fromages).
 
Et d’ailleurs, c’est ce que fait une grande partie de l’humanité. C’est ce qu’on appelle la cuisine, et les traditions culinaires permettent des assemblages avantageux : on mange ainsi du couscous (semoule et pois chiches) en Afrique du Nord, du riz avec des lentilles en Inde, ou du maïs avec des haricots rouges en Amérique centrale. Les spaghetti, avec parmesan, ou bolognaise avec de petits bouts de viande dans la sauce, le riz cantonnais ou notre sandwich-jambon (beaucoup de pain, un peu de jambon) obéissent à la même logique.
 
 

Manger de la viande pour son fer et ses différents oligo-éléments

Le fer, c’est important. La viande de bœuf contient 3 à 5,5 mg de fer pour 100 g, celle de porc et de mouton 1,5 à 2,3 mg pour 100 g, la viande de poulet 2 mg pour 100 g. Or 40 % de ce fer est dit fer héminique, où l’atome de fer est lié à une molécule d’hémoglobine ou de myoglobine. Ce fer là est directement assimilable par notre organisme, contrairement au fer des végétaux qui se révèle peu assimilable par le système digestif. Rappelons que les besoins de fer de l’organisme sont de l’ordre de 10 à 15 mg par jour. 
 
Les viandes sont aussi des sources appréciables de sels minéraux et d’oligo-éléments, potassium, phosphore, zinc et cuivre. Elles sont cependant pauvres en calcium et en magnésium. Enfin, toutes les viandes, et particulièrement la viande de porc, sont une source importante de vitamines du groupe B. 
 
Les personnes ne consommant pas de produits animaux ont donc un risque d’anémie hypochrome augmenté. On ne peut que leur conseiller de consommer des aliments riches en vitamine C (un verre de jus d’orange frais, par exemple), car cette vitamine facilite l’absorption du fer non héminique et de plus, supprime l’effet inhibiteur des phytates et des tanins sur l’absorption du fer. Le risque d’anémie est d’autant plus important chez les femmes enceintes, les enfants, ainsi que les femmes ayant des règles abondantes.
 
 

Manger de la viande pour son gras, parce que c’est nourrissant 

Réglons tout d’abord son sort à cette idée bizarre : mieux vaudrait qu’un aliment ne soit pas trop nourrissant, c'est-à-dire pas trop riche en calories pour 100 grammes d’aliment. Reprocher à la nourriture d’être nourrissante, n’est-ce pas étrange ? L’idée procède sans doute de ce que, si la nourriture a une haute densité calorique, il convient d’en manger des volumes plus petits pour se nourrir. Et en quoi serait-ce un problème ? L’idéal de chacun est-il de se bourrer le ventre ? En fait, les aliments à haute densité calorique se mangent en petites portions, très spontanément, car leur impression en bouche est bien plus puissante : on est satisfait avec de moindres volumes.

Nous sortons, assez lentement, il faut bien le dire, d’une époque où il était de bon ton de dire que les lipides auraient un impact sur le poids, en particulier sur les graisses animales, pleines d’acides gras saturés. Ces graisses seraient trop grasses, trop nourrissantes, et qui plus est encrasseraient les artères. Mais les scientifiques se sont aperçus qu’en fait, les choses étaient plus complexes. Toutes les graisses saturées ne sont pas athérogènes et toutes les graisses insaturées ne sont pas bonnes pour la santé. En fait, les viandes des ruminants sont riches en acide stéarique, auquel on n’a pas grand chose à reprocher. Les graisses de volaille, elles aussi, en particulier oie et canard, sont plutôt bonnes pour la santé. Les acides gras saturés qui sont les plus hypercholestérolémiants proviennent surtout du monde végétal, en l’occurrence des huiles de coprah, de palmiste, et — c’est source de controverses — de l’huile de palme.

En fait, plutôt que de se polariser uniquement sur les graisses saturées, on se préoccupe aujourd’hui davantage, au niveau des acides gras insaturés, du déséquilibre entre acides gras oméga 6 et oméga 3. Un excès d’acides gras oméga 6 par rapport aux oméga 3 aurait des effets athérogènes, ainsi que bien d’autres nuisances, sur le système immunitaire, sur l’équilibre émotionnel, la santé en général, et peut-être même sur le poids. Et c’est effectivement le cas pour beaucoup de produits animaux. Comment cela se fait-il ? Eh bien, cela provient du fait que, depuis les années 1960, avec l’industrialisation de l’agriculture, nombre d’animaux sont nourris avec des résidus industriels, des tourteaux de maïs et de soja, riches en oméga 6 et pauvres en oméga 3. 
 
Si les mêmes animaux sont à l’inverse nourris de façon plus naturelle, si les vaches paissent dans les prés, si les poules et poulets s’ébattent dans la nature, ou bien si on supplémente nos animaux, veaux, vaches, cochons, poules, avec des graines de lin, riches en oméga 3, alors on retrouve des viandes, des œufs, des laitages riches en acides gras oméga 3, comme dans l’ancien temps. En conclusion, n’ayons pas peur du gras de la viande, des œufs ou des laitages, mais achetons des produits de qualité, élevés dans des conditions naturelles. Certes, il seront plus chers, mais comme on en mangera moins…
 
 
 
Comme vous le voyez, il est compliqué de manger de la viande mais c’est tout aussi compliqué de ne pas en manger. Nous sommes alors obligé de faire quelques acrobaties diététiques, et de surveiller notre niveau de fer. Dans notre prochain épisode, nous aborderons la question qui tue : la viande donne-t-elle le cancer et allons-nous mourir dans d’atroces souffrances?

 

 

ARTICLES COMPLEMENTAIRES

Envie d'en savoir plus sur la viande ? Découvrez la relation compliquée de l'homme à la viande dans l'épisode 1, ou encore la relation entre la viande et le cancer, dans l'épisode 3.

 

AU SUJET DE L'AUTEUR DE L'ARTICLE

 

Gérard Apfeldorfer est psychothérapeute et spécialiste du comportement alimentaire.
Il enseigne les Thérapies Cognitivo-Comportementales et est l'auteur d'ouvrages 
portant sur les problèmes alimentaires comme "Maigrir c'est dans la tête", ainsi que sur l'application des TCC à d'autres problématiques comme les phobies. 
Il est, avec Jean-Philippe Zermati, l'initiateur du programme expliquant comment maigrir sans régime, basé sur la TCC du comportement alimentaire.

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